En cette avant-veille de fête des mères, je vous propose à travers cet article de revenir sur les origines et les « idéologies » de cette fête, afin d’en dénoncer, une fois n’est pas coutume, le conformisme retrograde, et – allez, n’ayons pas peur des mots – l’absurdité conventionnelle.
Messieurs, affalez-vous dans le canapé une bière à la main. Mesdames, à vos spatules et fourneaux. D’accord, ça donne dans le cliché, je veux bien l’admettre. Quoique…
La Genèse
Dans l’Antiquité, on fêtait déjà la mère. Certains civilisations polythéistes avaient leurs propres déesses-mères, bien souvent une déesse de la fécondité et/ou du foyer (avec ce que cela comporte idéologiquement…).
Ainsi, entre autres exemples, en Grèce Antique, on fêtait Rhéa, mère de tous les dieux ; tandis que chez les Romains on fêtait les Matralia, en l’honneur des femmes et des mères.
En France : une fête de la fécondité
Il faut faire un grand bon dans le temps pour évoquer les prémices d’une fête des mères en France. Au XIXème siècle, Napoléon évoque la création d’une fête des mères officielles, que l’on célébrerait au printemps. En 1897, l’Alliance Nationale contre la dépopulation lance l’idée d’une fête des enfants pour mettre en avant l’importance de la fécondité et les vertus de la famille…
Au début du XXème siècle, toute une série d’initiatives, plus ou moins « réussies », plus ou moins étendues, essayent d’instituer une fête des mères. Par exemple, dans le 16ème arrondissement de Paris, le 28 mai 1906 promeut une « fête placée sous le patronage de toutes les mères françaises ».
Le village d’Artas, dans l’Isère (région Rhône-Alpes) revendique la paternité (excusez le jeu de mots) de la fête des mères. Le 10 juin 1906, une cérémonie en l’honneur des mères de familles nombreuses y eut lieu. On apprend même que deux mères de neuf enfants y reçurent le diplôme et titre de « Haut mérite maternel ». Comme quoi, la capacité à être une bonne mère était quantifiée par le nombre de rejetons de cette dernière…
En 1920, dans le cadre de la politique nataliste encouragée par la République, le gouvernement officialise une « fête des mères de familles nombreuses« , apogée d’une époque où une des rares vertus reconnues aux femmes étaient de donner des enfants à la Patrie – de préférence des petits garçons, il ne faut pas abuser non plus…
Le régime de Vichy institue la fête des mères
Contrairement à ce que de bien trop nombreuses tentatives de réhabilitation de l' »œuvre » du Maréchal Pétain essaient de véhiculer, c’est bien ce dernier qui institue définitivement et inscrit dans notre calendrier, le 25 mai 1941, la « journée nationale des mères ». Le même Maréchal Pétain, de cette France où la terre, elle, ne ment pas, qui se satisfaisait du retour de la femme au foyer et derrière les fourneaux…. C’est donc bien à cause du Maréchal Pétain qu’est célébrée chaque année cette fête des mères, avec ce que cela sous-entend…
Pour achever le tout, le 24 mai 1950 est signé un texte de loi sur la fête des mères. La date de cette dernière est fixée au dernier dimanche de mai. En cas de superposition avec la fête de la Pentecôte, la fête des mères est célébrée le premier dimanche de juin. Le même système est opérant au Bénin, en République du Congo, au Gabon, à Madagascar, à Monaco et au Cameroun.
Un appel au boycott
J’appelle donc, aujourd’hui plus que jamais, au boycott de cette fête aussi rétrograde qu’inepte, qui vise à cantonner la femme au foyer et derrière les fourneaux. Et plus généralement, j’appelle au rejet de tous les conformismes. Qu’on cesse de faire ce que tout le monde fait parce que tout le monde le fait et parce qu’on le fait depuis la nuit des temps…
Vous me direz, depuis le début du XXème siècle, depuis les années 1940-1950, de l’eau a coulé sous les ponts. Certes, je vous l’accorde. Le problème est de savoir si les ponts se sont écroulés ou non, et si l’eau continue toujours d’y couler, ou pas.
Le « cadeau » de fête des mères
Pour voir si les choses et les mentalités ont évolué je propose que l’on regarde à travers le prisme de cette pratique du fameux cadeau de la fête des mères.
A l’heure où j’écris ces mots, deux pubs viennent de s’enchaîner à la télé, la première, du Florajet, propose d’envoyer des fleurs pour sa maman à l’occasion de la fête des mères. D’ailleurs, qu’elle est cette manie d’offrir des fleurs aux femmes ? Ne peut-on pas en offrir aussi aux hommes ? De plus, quelle preuve de futilité que d’offrir des fleurs qui faneront la semaine d’après, et qui seront bonnes pour la poubelle… Quitte à offrir des « fleurs », offrez plutôt quelque chose de durable, qui peut se replanter. Et n’attendez pas le jour de la « fête des mères » pour le faire.
L’autre pub, c’est celle d’Irobot (comme le film, mais en mieux) qui vous propose, mesdames (et seulement mesdames), de faire le ménage à votre place. La France du Maréchal est-elle si loin que ça ?!
Pour la suite de cet article, je me suis rendu sur Amazon. Sur la page d’accueil, on trouve cet encart…
J’ose alors, d’une main tremblante et d’une moue assurée, cliquer sur la chose, et là, c’est épique ! Des faits-touts, des poêles, des ustensiles de cuisine en tous genres en veux-tu en voilà… et même une promo sur les balais Vileda… et sur ce qui semble être le « meilleur ami de la femme », l’aspirateur… Choquant, navrant. La France du Maréchal est toujours là et durablement ancrée.
Pour corréler les informations obtenues, je me rends ensuite sur le site de Cdiscount… Et là, les choses sont plus insidieuses, mais non moins dangereuses… J’aperçois que la barre de navigation a été remaniée, pour faire apparaître la rubrique « Electro-ménager » en premier….
Après, c’est surement moi qui voit le « male » partout, mais ces pratiques me révoltent. Et ce qui me révolte encore plus, c’est la banalité de ces pratiques, que l’on trouve ceci normal.
NON ! Ce n’est pas normal ! NON ! La femme n’est pas soumise à l’homme.
OUI ! Vous pouvez boycotter ! OUI ! Vous pouvez changer les choses !