Cela s’est passé un 17 juillet

Le 17 juillet 1791. La fusillade du Champ-de-Mars consacre la dénaturation et l’avortement de la Révolution.

Le 17 juillet 1791, une fusillade se produit sur le Champ-de-Mars à Paris, conséquence immédiate de la fuite du roi Louis XVI jusqu’à Varennes. En effet, dès que la fuite du roi est connue, le club des Cordeliers demande aux députés de l’Assemblée Constituante de proclamer la déchéance du monarque et l’avènement de la République. Mais les députés s’y refusent et, le lendemain, le roi ayant été arrêté et ramené à Paris, ils inventent la fiction de son enlèvement : le roi se serait enfuit contre son gré et sa déchéance serait donc nulle et non avenue…

Le club des Cordeliers ne se satisfait en rien de cet arrangement et rédige une deuxième pétition en faveur de la République. Le texte est mis au point par Brissot, soutenu par Danton et Marat, et avec le concours de Choderlos de Laclos (oui, l’auteur des Liaisons dangereuses !). Les pétionnaires réclament « un nouveau pouvoir constituant » pour « procéder (…) au jugement du coupable et surtout au remplacement et à l’organisation d’un nouveau pouvoir exécutif ».

Le texte est déposé le 17 juillet 1791 sur l’autel de la patrie du Champ-de-Mars, à l’endroit où a eu lieu la Fête de la Fédération [14 juillet 1790, l’origine de la fête nationale actuelle (et non comme communément admis la prise de la Bastille)], afin de le faire signer par les Parisiens.

Mais deux hommes, cachés sous l’autel, sont pris à partie et massacrés par la foule. Effrayés, les députés de l’Assemblée craignent que la Révolution ne sombre dans l’anarchie (il leur en faut peu), et que la déchéance de Louis XVI n’entraîne la fRance dans une guerre contre les autres monarchies européennes. Prétextant le trouble à l’ordre (une méthode dès lors bien connue), ils ordonnent au maire de Paris, Jean Bailly, de proclamer la loi martiale.

Malheureuse_journée_du_17_juillet_1791

Ce dernier, révolutionnaire modéré, élu maire le lendemain de la prise de la Bastille, ne se fait pas prier : sans tergiverser, il fait appel à la garde nationale et lui ordonne de disperser la foule du Champ-de-Mars. Commandée par La Fayette en personne, elle y est accueillie à coups de pierres. Sans sommation, la garde nationale ouvre le feu sur les pétitionnaires, causant plusieurs dizaines de morts. De nombreuses arrestations complètent la répression. Le club des Cordeliers est fermé, tandis que Danton et Marat se sont enfuis en Angleterre.

 

Au club des Jacobins, l’atmosphère est bien différente. De nombreux militants (y compris Robespierre), jugent inopportun ou prématuré d’abolir la monarchie et légitime ainsi la répression du Champ-de-Mars. Il s’agit d’une des premières failles dans le consensus révolutionnaire.

Cela s’est passé un 3 juillet

Le 3 juillet 1940. La flotte française de Mers-el-Kébir est coulée par les Anglais.

Le général Vuillemin, commandant l’aviation fRançaise, ne veut pas que ses avions tombent aux mains des Allemands. Le 16 juin, il ordonne le transfert sur l’Afrique du Nord de 16 groupes de bombardiers et de 18 groupes de chasse, des appareils tout juste sortis d’usine. Par cette manœuvre, le 25 juin, 700 appareils opérationnels sont présents en Afrique du Nord.

Il n’en va pas de même pour la marine. Une clause de l’armistice franco-allemande du 22 juin 1940 précise :  » La flotte de haute mer doit regagner ses ports d’attache pour y être démobilisée et désarmée sous le contrôle des Allemands et des Italiens. » Pour la Grande-Bretagne, le contrôle des océans par la Royal Navy est une condition essentielle à sa survie. Churchill craint un coup de force allemand sur la flotte fRançaise. Si celle-ci tombe entre les mains du Reich, l’Angleterre sera menacée.

Le 3 juillet 1940 au matin, une escadre de l’amiral anglais Somerville se présente devant la rade de Mers-el-Kébir, près d’Oran, où sont mouillés onze bâtiments de guerre fRançais sous le commandement du vice-amiral Gensoul. Somerville transmet à Gensoul quatre propositions de Churchill :

  1. rejoindre la flotte britannique pour participer à la lutte ;
  2. gagner des ports hors d’atteinte des Allemands, comme aux Antilles ;
  3. se saborder ;
  4. être coulé.

Gensoul envoie un télégramme tronqué à l’amirauté ! « Ultimatum anglais : coulez vos bâtiments ou nous vous y contraindrons par la force. » Il omet volontairement de citer la possibilité d’un départ pour les Antilles. L’ « ultimatum » est rejeté. Gensoul répond à Somerville : « Les bâtiments fRançais se défendront par la force ».

Merselkebir
Les cuirassés fRançais tentent de s’échapper de la rade de Mers-el-Kébir, 3 juillet 1940.

Le 3 juillet, à 16h37, une salve d’obus anglais s’abat sur l’escadre fRançaise. A 17h15, Gensoul demande un cessez-le-feu. 1297 marins fRançais sont morts, la plupart sur le cuirassé Bretagne qui est rapidement coulé.

La brutalité de l’attaque de Mers el-Kébir réveille en France une anglophobie latente. C’est une aubaine pour les partisans d’une collaboration avec l’occupant. Une semaine plus tard, le 10 juillet 1940, l’Assemblée nationale issue des élections de 1936 et du Front populaire vote à une écrasante majorité les pleins pouvoirs au maréchal Pétain…